Nous avons vu comment, en surexploitant la main d'oeuvre d'Amérique centrale, les Etats-Unis nourrissaient un capitalisme agro-alimentaire compétitif. Nous avions vu également dans un autre article l'expansion des formes contraintes du travail capitaliste. C'est dans ce cadre que s'inscrit également le "capitalisme carcéral" dans un monde sous domination du capital.
Le développement du capitalisme en Chine est dû, dans une certaine
mesure, au travail carcéral dont une partie de la main d'oeuvre est "recrutée" parmi les dissidents politiques, à l'inverse les pays
occidentaux développent un capitalisme carcéral basé sur une main d'oeuvre
de droit commun.
La presse bourgeoise offre le spectacle d'un catalogue d'atrocités sans jamais montrer la racine économique qui nourrit le capitalisme carcéral en Chine et son lien avec le capitalisme mondial
Les camps de travail chinois unissent les intérêts des pouvoirs locaux -parfois corrompus- et les intérêts capitalistes liés à cette méthode de production (le directeur de camps est "chef d'entreprise"). Cette production fortement compétitive fonctionne à partir de 4000 camps (mines, usines, fermes, ...) employant environ 5 millions de détenus-ouvriers. Le chiffre d'affaire annuel est d'environ 200 millions d'euros selon les sources officielles (ce qui veut dire que ce chiffre est nettement en-deçà de la réalité que veulent cacher les autorités).
Cependant le capitalisme carcéral n'est pas en reste dans les pays occidentaux, bien au contraire. L'effet pervers capitalisme-exclusion-travail carcéral marche à plein régime : le travail salarié que le précariat ne trouvait pas en dehors il le trouve désormais, à des conditions encore plus avantageuses pour le capital, à l'intérieur de son univers carcéral.
Voici ce que déclarait un sociologue des prisons (France) dans un entretien à la presse :
Mais revenons aux propos de notre sociologue : le travail carcéral (donc concurrentiel des salariés en liberté) est-il en pleine croissance comme nous tentons de le prouver ? En valeur absolue cela est déterminant et confirme nos analyses. Cependant la croissance de la population carcérale est telle qu'il convient de relativiser les données en pourcentage (taux d'activité = détenus actifs/population carcérale totale).
Encore faut-il faire une distinction entre les Maisons d'Arrêt et les Etablissements de Peine :
Informations du Ministère de la Justice (France) :
Le cynisme et la froideur du capitalisme trouve dans la misère carcérale une base sociale propice au développement du travail salarié, l'Etat fournit un cadre juridique à la surexploitation. Cependant, en France cette forme de travail reste encore peu développée et il serait utile de dresser un tableau de l'économie carcérale à l'échelle occidentale afin d'amorcer un débat sur le développement -ou non- de cette forme de travail dans cette région du monde.
Cependant le capitalisme carcéral n'est pas en reste dans les pays occidentaux, bien au contraire. L'effet pervers capitalisme-exclusion-travail carcéral marche à plein régime : le travail salarié que le précariat ne trouvait pas en dehors il le trouve désormais, à des conditions encore plus avantageuses pour le capital, à l'intérieur de son univers carcéral.
Voici ce que déclarait un sociologue des prisons (France) dans un entretien à la presse :
En prison, les travailleurs ne sont pas encadrés par le droit commun du travail mais par le Code de procédure pénale. Ils n’ont donc pas de contrat de travail (article 717-3). Les détenus ressentent un profond sentiment d’injustice, notamment parce qu’ils n’ont aucune indemnité en cas d’arrêt maladie et parce qu’ils sont sous-payés. Ils se comparent eux-mêmes à des travailleurs du tiers-monde ou à des esclaves modernes. Il ne s’agit pas d’une zone de non-droit mais d’une zone d’exclusion du droit du travail organisée par l’Etat : c’est parce qu’ils sont détenus qu’ils sont privés du droit commun, cela fait partie de la peine. Changer, cela impliquerait d’agir sur la conception et l’organisation de la peine. [...]
La rémunération du travail en prison n’est pas respectée. En principe, un décret du Code de procédure pénale fixe un seuil minimum de rémunération (SMR). Actuellement, il est à 3,94 euros de l’heure (ndlr : le smic horaire brut est de 9€40 depuis juillet dernier) mais sur le terrain, il est rarement atteint. Dans les faits, le SMR est plutôt un plafond qu’un seuil et les détenus restent majoritairement payés à la pièce, qui reste un mode de rémunération pratique pour l’administration et les entreprises : on paye les gens selon leur productivité, ce qui permet de ne pas se soucier d’organisation du travail. Du coup, l’hétérogénéité des salaires est forte et varie souvent du simple au triple dans le même atelier. Les détenus qui travaillent bénéficient aussi de gratifications non négligeables en prison : ils peuvent par exemple prendre une douche tous les jours contre une tous les deux jours.Le mécanisme pervers mis en place par l'institution carcérale exclusion-ennui opposé dans le vécu des prisonniers à l'intégration-travail oblige alors à trouver "attrayante" ce travail surexploité "contraint" par la force des choses (les conditions de vies matérielle et psychologique en prison).
Mais revenons aux propos de notre sociologue : le travail carcéral (donc concurrentiel des salariés en liberté) est-il en pleine croissance comme nous tentons de le prouver ? En valeur absolue cela est déterminant et confirme nos analyses. Cependant la croissance de la population carcérale est telle qu'il convient de relativiser les données en pourcentage (taux d'activité = détenus actifs/population carcérale totale).
Encore faut-il faire une distinction entre les Maisons d'Arrêt et les Etablissements de Peine :
Une grande majorité de détenus souhaite travailler, mais il n’y a pas suffisamment d’emplois. Si le taux d’activité dans les prisons françaises est passé de 46,5 % en 2000 à 39 % en 2010, c’est parce que la population carcérale s’est accrue de 22,2 % sur la même période, alors que le volume d’emploi n’a progressé que de 8,3 %. Au reste, il faut distinguer le cas des maisons d’arrêt (MA) où seulement un tiers des détenus travaillent et celui des établissements pour peine (EP) où le taux d’activité est de 53 %.(...) La situation est totalement différente dans les EP, où les ateliers sont équipés, le travail comprend un temps d’apprentissage, il s’insère dans la longue durée de la peine et les détenus y travaillent 35 heures par semaine. Or les maisons d’arrêt sont plus nombreuses et plus peuplées que les établissements pour peine.Le travail carcéral est donc limité par de nombreux facteurs ce qui empêche pour l'instant son développement, malgré les avantages certains qu'il procure aux capitalistes. Le capitalisme mondial peine à croître sont taux de profit, quelle sera alors l'évolution de ce travail contraint multiforme à l'échelon international ?
Informations du Ministère de la Justice (France) :
Le travail
« Les autorités pénitentiaires doivent s’efforcer de procurer un travail suffisant et utile [aux détenus] »
Travailler en détention est considéré comme un droit pour les détenus qui le souhaitent.
Règle pénitentiaire européenne 26.2
L’activité professionnelle est fondamentale pour la réinsertion future des personnes incarcérées.
Elle leur permet aussi de s’assurer une rémunération pour indemniser les victimes, préparer leur sortie, aider leurs familles et améliorer leur quotidien en détention.
Le travail en prison différentes possibilités :
• Le service général : les détenus participent à l’entretien et au fonctionnement
de la prison.
• Les ateliers de la régie industrielle des établissements pénitentiaires (RIEP).
• Le travail en concession : les détenus travaillent pour le compte d’entreprises privées qui installent un atelier en prison.
(...)
Les avantages pour l’entreprise
Une solution économique : flexibilité et proximité
Le travail en prison offre 3 avantages:
• proximité : avec 191 établissements pénitentiaires, il existe au moins une prison par département,
• gain financier : un mode de rémunération basé sur la production réelle et des charges patronales moindres,
• flexibilité : une souplesse et une réactivité qui permettent de mobiliser rapidement un grand nombre d’opérateurs pour répondre aux commandes.
Les conditions de l’emploi en prison
Le travail en détention obéit à des règles spécifiques.
Un cadre souple
Le Code de procédure pénale indique que les relations de travail des personnes incarcérées ne font pas l’objet d’un contrat de travail entre le détenu et le concessionnaire.
Couverture sociale
Les détenus bénéficient d’une protection sociale dès leur incarcération.
L’administration procède à leur inscription à la CPAM. Les détenus sont garantis contre les accidents du travail et les maladies professionnelles par l’application du régime spécial de la sécurité sociale. Ils sont également affiliés à l’assurance vieillesse du régime général de la sécurité sociale.
Rémunération
L’organisation, les méthodes et les rémunérations du travail doivent se rapprocher le plus possible de celles des activités professionnelles extérieures.
Durée du travail
L’article D.108 du Code de procédure pénale précise que la durée du travail pénitentiaire doit se rapprocher des horaires pratiqués dans la région ou le type d’activité concerné. Elle ne peut être supérieure.
Hygiène et sécurité
Les règles d’hygiène et de sécurité sont applicables aux détenus. Cependant, elles ne s’étendent pas aux dispositions relatives à la médecine du travail en raison des règles propres au travail pénitentiaire.
A noter :
• la protection des détenus contre les risques d’accidents est prévue dans le code de la Sécurité sociale,
• le suivi sanitaire des personnes incarcérées qui travaillent est assuré par les unités médicales implantées dans chaque établissement,
• les entreprises sont encouragées à délivrer une attestation de compétences à l’issue de la période de travail.
Le travail en concession
Dans ce système, les détenus travaillent pour le compte d’entreprises privées, au sein d’ateliers installés dans les prisons.
L’administration pénitentiaire
• Affecte les détenus en fonction des critères formulés par l’entreprise.
• Verse les rémunérations et les prélèvements sociaux.
• Fournit gratuitement les locaux industriels adaptés à l’activité.
• Assure la surveillance et garantit la sécurité.
• Adapte l’organisation, l’environnement et le temps de travail aux besoins de
l’entreprise.
L’entreprise concessionnaire
Apporte ses matériels de production et équipe les locaux attribués.
• Gère sa production, depuis l’approvisionnement en matières premières jusqu’à l’enlèvement des produits finis.
• Assure le contrôle qualité de la production et l’encadrement technique des détenus.
• Rémunère le travail en versant à l’établissement l’ensemble des salaires et charges afférentes à son activité.
Nature des activités
Le travail consiste en une très grande variété de tâches : conditionnement, montage de composants électroniques, menuiserie, moteurs d’avion, activités de numérisation…
Quelques repères
• Environ 9 000 détenus travaillent quotidiennement dans des ateliers de concession.
• Plus de 30 millions d’euros sont versés en salaires chaque année.
La concession est le dispositif qui permet à l’entreprise de :
• renforcer ses capacités de production de façon ponctuelle ou permanente,
• limiter son engagement financier en lui offrant l’usage des locaux pour la production et le stockage,
• lisser ses plans de charge et réguler sa production grâce à la souplesse de l’organisation et du temps de travail sans surcoût salarial,
• conserver son savoir-faire et ses méthodes de gestion par l’emploi dans les ateliers de son personnel d’encadrement,
• différer le recours à l’investissement pour le lancement d’opérations pilotes et de petites et moyennes séries,
• déléguer la gestion administrative à l’établissement qui reste l’employeur.
(...)Le travail dans les établissements à gestion déléguée
Qu’est-ce qu’un établissement à gestion déléguée ?
Une quarantaine d’établissements relèvent de ce mode de gestion.
• L’administration pénitentiaire et son personnel gardent la responsabilité de la direction de l’établissement, de la garde, de l’insertion et du greffe.
• Les autres missions sont déléguées à des groupements privés : gestion courante de l’établissement (hôtellerie-restauration, nettoyage, maintenance et entretien des locaux…) et certaines fonctions comme la formation professionnelle et le travail.
Dans ces établissements à gestion déléguée, ce sont donc des groupements privés qui proposent du travail aux détenus qui en font la demande : service général ou production en ateliers.
Les groupements privés sont amenés à proposer des contrats de sous-traitance à des entreprises dans les établissements dont ils ont la charge.
La RIEP
La régie industrielle des établissements pénitentiaires existe depuis 1951. Depuis 1998, elle est gérée par le service de l’emploi pénitentiaire (SEP), service à compétence nationale.
De nombreux secteurs d’activité
• Informatique, PAO, imprimerie
• Menuiserie
• Confection
• Métallerie...
Le (SEP) est chargé
• d’organiser la production de biens et de services par des détenus et d’en assurer la commercialisation,
• d’assurer la gestion et l’aide au développement d’activités de travail ou de formation dans les établissements pénitentiaires,
• de gérer la régie industrielle des établissements pénitentiaires (RIEP).
Repères
• 1 200 détenus travaillent dans 48 ateliers implantés dans 27 établissements
• Un chiffre d’affaires annuel (HT) de 22,8 millions d’euros
• 6 millions d’euros versés en salaires
Le service général
Le service général désigne l’ensemble des emplois occupés par des détenus dans des fonctions de maintenance, de restauration, d’entretien des lieux de vie collective.
• 6 800 postes de travail
Travail au service général
• Plus de 18 millions d’euros versés en salaires
• 3 à 7 heures de travail par jour
Le cynisme et la froideur du capitalisme trouve dans la misère carcérale une base sociale propice au développement du travail salarié, l'Etat fournit un cadre juridique à la surexploitation. Cependant, en France cette forme de travail reste encore peu développée et il serait utile de dresser un tableau de l'économie carcérale à l'échelle occidentale afin d'amorcer un débat sur le développement -ou non- de cette forme de travail dans cette région du monde.